20 septembre 1872 18 avril 1958 |
Maurice Gamelin est né à Paris le 20 septembre 1872, il est le fils du général Zéphirin Gamelin, originaire d'Estaire (Nord), qui terminera sa carrière comme contrôleur général des armées et d’une mère alsacienne.
Brillant élève, il obtient le prix de philosophie au concours général, ayant de réelles dispositions pour les arts, il suit les cours de l'école du Louvre avant de décider de préparer le concours de Saint-Cyr. Il intègre l'école en 1891, promotion "du Soudan", et sort major de sa promotion en 1893.
Le sous-lieutenant Gamelin est alors affecté en Afrique du Nord, au 3e régiment de tirailleurs algériens, puis à la brigade topographique de Tunisie, où ses dons pour le dessin et l'observation le mettent en valeur.
En 1897, il est admis avec le 8e rang à l'école de guerre, et termine deuxième de sa session. Après un stage à l'état-major du 15e corps où ses qualités intellectuelles sont remarquées , il commande en 1904 une compagnie du 15e bataillon de chasseurs.
En 1906 il publie son "Etude philosophique sur l'art de la guerre" qui le positionne parmi les meilleurs tacticiens militaires de son époque.
Cette même année sera décisive pour la carrière qui s'annonce brillante de Maurice Gamelin.
Affecté comme d'officier d'ordonnance du général Joffre, commandant la 6e division d'infanterie, il le suivra dans ses affectations: à l'état-major du 2e corps en 1908, au conseil supérieur de la Guerre en 1910 et après un court intermède en 1911 où, chef de bataillon, il prend le commandement du 11e bataillon de chasseurs à Annecy, il rejoint à nouveau Joffre à l'état-major général le 23 mars 1914 en qualité de chef de son cabinet militaire.
Nommé lieutenant-colonel le 1er novembre 1914, il doit quitter son poste d'état-major pour le commandement de la 2e brigade de chasseurs à pied qu'il mène brillament au combat en Alsace puis dans la Somme.
Colonel en avril 1916, ses capacités au combat comme en état-major lui valent d'être nommé, huit mois plus tard, général de brigade à titre temporaire.
Rappelé par joffre en 1917, lors du remplacement de Joffre par Nivelle, il demande un commandement et reçoit le 11 mai 1917 celui de la 9e division d’infanterie. Soucieux d’économiser la vie de ses hommes, il n’en témoigne pas moins d’une grande habileté tactique, comme le montrent ses combats dans la région de Noyon au printemps 1918 où la division Gamelin permet, de sauver une situation critique en ralentissant l'avance allemande dans la vallée de l'Oise, autorisant ainsi la jonction des forces franco-britaniques. Il est promu général de brigade à titre définitif en septembre 1919.
Fin 1919, le général Gamelin est nommé chef de la mission militaire française au Brésil et y rend de grands services; malade, il sera contraint de renter en France en décembre 1924.
Le 2 septembre 1925, jeune général de division, il est en Syrie, adjoint au général Sarrail, comme commandant des troupes du Levant. Son action va permettre de redresser la situation de la France sur ce territoire et lui vaut sa promotion au grade et appellation de général de corps d'armée en septembre 1927.
En février 1929, malgré les restrictions émises par Henri de Jouvenel, haut commissaire de France au Levant, Gamelin reçoit le commandement prestigieux du 20e corps d'armée à Nancy.
En 1930, son rappel à Paris va lui ouvrir les portes des plus hautes responsabilités militaires. Nommé sous-chef d'état-major général sous les ordres du général Weygand, il lui succède le 9 février 1931.
Membre du conseil supérieur de la guerre, il resserre ses liens avec les milieux politiques et le gouvernement et est nommé vice président du conseil supérieur de la guerre le 9 février 1935.
Véritable chef de l'armée française dès 1931, le général Gamelin poursuivra son ascension lorsqu'il sera nommé chef d'état major de la Défense Nationale le 21 janvier 1938 puis commandant en chef des forces alliées en France en septembre 1939. Sa position le rend donc directement responsable des choix qui seront faits au plan militaire. En outre, sa qualité de conseiller militaire direct des gouvernements qui vont se succéder durant cette période, l'implique nécessairement dans les orientations politiques qui seront prises par la France.
A ce poste clé, le général Gamelin se révèle fin diplomate, mais face aux évènements majeurs du moment: remilitarisation de la Rhénanie, affaire tchécoslovaque, guerre d'Espagne, crise polonaise , menaces de l'allemagne nazie, ses idées tactiques obsolètes, sa tendance à temporiser et son souci de favoriser la politique timorée de la IIIe République lui font porter une lourde responsablité dans le manque de moyens et de préparation de l'armée française lors du déclenchement du conflit.
Il lui sera particulièrement reproché d'être à l'origine de l'abandon de la Thécoslovaquie en 1938, malgré les accords mutuels de défense, signés entre les deux pays, qui ne seront pas respectés par la France, mais c'est surtout l'attitude équivoque et le manque d'audace du chef de l'armée française qui vont poser les jalons d'un désastre prévisible.
A l’inverse de Joffre avant 1914, Gamelin ne favorise pas la réflexion tactique et technique. Les innovations des armées étrangères ne trouvent pas chez lui l’écho favorable qui aurait permis d’en faire bénéficier l’armée française. Ni l’exemple des parachutistes russes, ni celui des blindés allemands ne l’incitent à lancer des recherches de grande ampleur dans ces directions. L’exemple de l’emploi des chars d’assaut est révélateur de cette situation.
Lorsque la guerre se déclenche, en septembre 1939, Gamelin se dérobe à nouveau en ne lançant pas la puissante action offensive contre l’Allemagne promise aux Polonais. Une fois encore il temporise et, après quelques incursions en Sarre, il fait rentrer l’armée française dans ses cantonnements et laisse passer l'occasion unique de bousculer un ennemi largement inférieur en nombre, l'essentiel de l'armée allemande étant engagé en Pologne.
Par crainte de représailles et par manque d'audace, il fait avorter plusieurs projets d’actions contre l'Allemagne: bombardement de la Ruhr, pose de mines dans le Rhin proposée par les anglais...
Gamelin a établi son quartier général au fort de Vincennes, proche du pouvoir politique mais loin du front, il y vit en ermite replié sur lui même. Son éloignement du front perturbe la chaine de commandement et sa rivalité avec son adjoint direct, le général Georges, aggrave encore cette situation.
Le commandant en chef des forces alliées va rarement au contact de ses soldats, il manque de charisme et d'applomb et n'impose jamais une ligne directrice ferme et efficace pour la conduite de la guerre, il "estime", il "suggère" et finalement il sera complètement dépassé par les évènements lorsqu'à partir du 10 mai 1940 les hostilités se déchaineront.
Gamelin va alors s'abriter derrière le général Georges sans intervenir dans le déroulement des opérations. L’un de ses ordres du jour est resté célèbre. Il commence par la formule : "Sans vouloir intervenir dans la conduite de la bataille en cours...". C’est un aveu de démission à un moment où le besoin de mesures fermes et de choix clairs était non seulement essentiel mais vital.
Relevé de son commandement le 19 mai 1940, Gamelin est remplacé par le général Weygand qui ne pourra rien faire pour endiguer le flot allemand. Le manque de préparation et de modernisation de l'armée française, la stagnation de la doctrine d'emploi, les occasions manquées de 1939 et l’absence d’un véritable chef depuis la déclaration de guerre interdisant tout redressement.
Le 6 septembre 1940, Gamelin est arrêté et mis aux arrêts par le régime de Vichy. Il est enfermé au fort de Portalet avec Blum, Daladier, Mandel et Reynaud.
Traduit le 19 février 1942 devant la Haute Cour à Riom, il refuse de participer aux débats et reste silencieux pendant toute l’instruction qui sera finalement ajournée.
Le 14 mars 1943, lors de l'occupation de la zone libre, il est arrêté par les allemands et déporté à Buchenwald puis à Itter au Tyrol où il retrouvera Weygand, ce qui ne manquera pas de provoquer quelques frictions entre les deux hommes.
Gamelin est libéré en mai 1944 par les troupes américaines. Dès lors et jusqu'à la fin de sa vie, il n’aura de cesse de justifier ses actes de 1939-40, devant une commission parlementaire tout d’abord, puis dans ses mémoires.
Excellent officier, remarquable acteur de la Grande Guerre, Maurice Gamelin ne fut hélas qu'un piètre général en chef de l'armée française.
Il décède à Paris au Val de Grâce le 18 avril 1958 et est inhumé au cimetière de Passy.