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Le commandant Louis BOSSUT

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Louis Bossut naît le 17 avril 1873, au sein d’une famille d’industriels et commerçants en textile de Roubaix. Son père Jean est négociant et armateur.

Né juste après la défaite, son enfance sera baignée dans l’espoir de revanche et de reconquête de l’Alsace et de la Lorraine. Il reçoit une éducation rigoureuse et très religieuse, mais dans une famille où l’amour filial domine. Second enfant, il est aîné des garçons, et bien que le plus petit en taille, il sera toute sa vie admiré et aimé de tous les siens. Il entretient des relations privilégiées avec sa grand-mère qui favorisera son goût pour la musique, et son père, qui sera toute sa vie un complice et particulièrement pour suivre ses compétitions hippiques.

Il fait ses "humanités" chez les Jésuites à Boulogne sur mer, et obtient son Baccalauréat es lettres, le 17 novembre 1891.

Son espoir de poursuivre ses études à l’Ecole Navale est déçu par un refus dû à la mauvaise qualité de sa vue qui l’obligera toute sa vie à porter le monocle qui l’a personnalisé.

C’est cependant l’Armée et la Cavalerie qui l’attirent et il s’engage pour 4 ans le 7 juillet 1892 au 19e chasseurs à Hesdin dans le Pas de Calais. Il y est brigadier en janvier 93, maréchal des logis en octobre de la même année, et maréchal des logis-chef en juin 1895. Déjà très bon cavalier, il se fait également remarquer pour ses qualités de ténor et la presse locale le signale. Il rencontre à Hesdin, Emme Thuillier qu’il épouse lors d’un voyage en Angleterre, voyage effectué probablement pour des compétitions hippiques.

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Le 7 juillet 1896 il renouvelle son engagement et devient élève en octobre 98 à Saumur. Nommé sous-lieutenant le 25 septembre 1899, il est affecté au 22e dragons à Sedan, puis au 14e dragons. Lieutenant en 1901, capitaine en 1909, il reçoit une formation d’instructeur à Saumur, et se signale par des conférences "engagées" en 1911.

Son amour pour les animaux et son goût pour la compétition, l’amènent très rapidement aux courses hippiques; la presse se fait déjà l’écho de ses succès en 1891,il à 18 ans. Très rapidement il monte avec 3 licences: Gentleman-rider , Military, et Jockey. Il ne manque pas de participer également à rallyes et cross-country. Une incursion au trot à Berck en août 1909 sera sans suite.

Il se fait rapidement connaître comme cavalier de grande valeur, tant dans les milieux hippiques internationaux que comme cavalier militaire. Ses lettres à son père lorsqu’il apprend à "monter à cheval" sous la directive d’écuyers du Cadre Noir sont savoureuses: il se repose de cette instruction en s’occupant de l’entraînement de ses 7 chevaux personnels. Dès 1906, après qu’il ait remporté 5 courses sur 5 courues à Verdun, son père collectionne les coupures de presse des résultats de Louis avec ses chevaux ou ceux d’autres propriétaires. En effet, il a une écurie personnelle, probablement peu fréquente, même à cette époque. On le voit donc soit avec les couleurs de propriétaires soit sous ses propres couleurs "gris perle, croix de Saint-André noire, manches cerclées noir et gris perle", toque noire.

Jusqu’en 1914, il courra plus de 250 courses et en gagnera 150. Pendant trois années il sera 1er compétiteur en Gentleman-rider (GR) avec plus du double de victoires que le second.

En mars 1912, il prend un congé sans solde et s’installe entraîneur à Warenghem. A partir de cette date, ses couleurs seront: casaque cerise, toque gros bleu et or (C’est cette casaque qui est au musée de l’Ecole à Saumur). Echec ou nostalgie de l’armée, il regagne le 14e dragons puis le 1er dragons à Joigny où il prend le commandement du 3e escadron. Pendant toute cette période d’avant guerre, il s’intéresse à d’autres sports, notamment le cyclisme, la moto et même entraîne son chien Rigby à la compétition. Son entourage est également sportif. Le rugby: son frère Pierre, son cousin Raymond Wattine – qui sera international – son beau-fils, Georges qui fera également de l’athlétisme et du football. Ce sont eux qui amèneront plus tard, au 1er dragons puis à Champlieu les compétitions et également le fameux "Rick...".

La guerre trouve le 1er dragons en garnison à Luçon et le 3e escadron détaché aux Sables d’Olonnes. Le régiment est rapidement engagé avec des méthodes de combat napoléoniennes: les lances contre les mitrailleuses. Les premiers engagements ont lieu le 20 août 1914 à Neufchâteau, et reçoit dès le 10 septembre la croix de guerre et sa première citation. Après la bataille de la Marne, le 1e dragons participe aux contre-attaques: "malgré la fatigue des chevaux et les effectifs réduits, le 1er dragons repasse la Marne et déloge les allemands de Somme-Veste, la progression dans la journée dépasse 29 km ". Entre le début de la guerre et le 24 avril 1915 le capitaine Bossut est cité 6 fois. Il reçoit la Croix de Sainte Anne de Russie que lui remet le président de la République. Il est nommé chef d’escadrons le 4 octobre 1916.

La guerre de position a mis les dragons à pieds dans les tranchées, et de plus dans un secteur où il ne se passe rien, dans le sud de l’Alsace. Il écrira sur une photo le montrant jouant au croquet : "le croquet, le jeu de guerre où l’on s’eng…le plus ".

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L’appel aux volontaires "pour une mission secrète et dangereuse" lancé pour former les troupes de l’artillerie d’assaut, le trouve volontaire et il vide une partie du 1er dragons, principalement le 3e escadron.

La rencontre avec le général Estienne est fructueuse, celle avec la commission parlementaire, moins. Cependant, là aussi il entraînera l’enthousiasme: le député de Gouyon, membre de cette commission démissionnera de son mandat pour être l’assistant technique du commandant pour la préparation de l’attaque du 16 avril 1917. Il luttera pour apporter des modifications au matériel – qui malheureusement ne seront appliquées qu’après le 16 avril – et ne manquera pas de critiquer ouvertement la commission parlementaire, responsable de la disparition du secret. De même il échouera sur sa proposition de déplacer le terrain de l’attaque: mais il obtiendra du commandement l’autorisation de mener son groupement "de 80 chars (déjà !)" au combat.

Auparavant, tant à Marly le Roi, au Trou d’Enfer, qu’à Champlieu, il fera régner, assisté par ses compagnons du 1er dragons, une ambiance à la fois laborieuse et décontractée.

Le général Estienne, lui rendant hommage lors de l’inauguration du monument à sa mémoire à Roubaix en octobre 1925, dira:
"Bossut est mort vainqueur…(les sacrifices) ont été payés d’un très réel succès".

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L’HOMME:

Ses qualités morales, son dynamisme, son dévouement et sa gaieté sont points marquants de sa forte personnalité. Sa foi, due à son éducation et son instruction, ne le quittera jamais et le général Estienne pourra dire, toujours à l’inauguration du monument de Roubaix:
"…pieux comme un croisé, Bossut, tel Bayard improvisant un crucifix avec la garde de son épée…"
Il a confessé aussi, la veille de l’attaque de Berry au Bac à son vieux camarade Audibert en parlant du fanion de commandement, bénit au Sacré Cœur, "… Là où je le sortirai, on ne viendra pas voir si j’y ai fait broder un Sacré Cœur… " (le même fanion se trouvait sur les chars de Pierre Bossut – il est en ma possession – et du Lieutenant Moello dont le sous chef était Raymond Wattine).

Son dévouement pour la Patrie va jusqu’à ses hommes et il trouve normal d’aller lui-même chercher le corps du maréchal des logis-chef Hermelin tué et resté dans les lignes ennemies même s’il faut pour cela tuer une sentinelle allemande d’un coup de révolver.

Sa foi et son dévouement ne l’empêchent pas d’être perpétuellement prêt à faire la fête. On trouve la preuve de son dynamisme – on dirait aujourd’hui, son tonus – dans ses activités hippiques : tombé dans une course, il remonte et termine second. De plus, peut-on imaginer qu’avant la guerre de 1914 il court aux 4 coins de la France et même de l’Europe, quelques fois 3 jours par semaine avec les moyens de communication de l’époque, tout en assurant – à la satisfaction de ses supérieurs – ses devoirs d’officier.

Aussi peut-on comprendre que quelques années plus tard il ait servi de modèle à un de ses sous-officiers du 1er dragons, devenu metteur en scène de renom, lorsque Jean Renoir crée le personnage du capitaine Boëldieu dans la Grande Illusion (même le choix du nom est une référence au mélomane et à la villa qu’occupait Louis Bossut aux Sables d’Olonne "la villa des Grieux").

LE SOUVENIR:

Un certain nombre de marques du souvenir du commandant Bossut sont encore visibles actuellement: